Non à la ligne claire !
Posted by Dominique Lahary sur 28 octobre 2011
Cette semaine où sort en salle le Tintin de Spielberg, loin de moins l’idée de condamner l’école de BD belge qu’on désigne sous cette expression, ce que rappelle la BnF ou Wikipedia et qu’un blog célèbre. Elle a nourri ma jeunesse et mon adolescence et m’enchante encore, sans préjudice d’autres écoles.
Mais la ligne claire, c’est celle qui délimite des contours et sépare avec netteté l’objet ou le personnage du reste du monde.
Non à la ligne claire qui délimite la bibliothèque, l’enferme dans ce qu’elle est, la sépare de ce qu’elle n’est pas. Je parle ici de la bibliothèque publique, mais suppose que ma problématique peut valoir au-delà de ce champ.
A mesure que progresse dans les débats professionnels et politiques l’idée de multiplicité des usages et fonctions possibles des bibliothèques, un mouvement inverse s’exprime sous forme de rappel à l’ordre : « ce n’est pas le rôle de la bibliothèque de… ».
Cette injonction vient le plus souvent du milieu bibliothécaire, mais aussi parfois de cadres dirigeants territoriaux ou d’élus.
Elle repose sur l’idée d’une essence de la bibliothèque, qui serait menacée, qu’il faudrait protéger, et qui se maintiendrait, suppose-t-on, à travers les âges (depuis Alexandrie ?)
S’il est utile de considérer l’histoire des bibliothèques et de déceler des permanences et des filiations, les enfermer dans des contours dressés a priori n’a politiquement pas de sens.
La bibliothèque est un outil des politiques publiques locales. Ses contours peuvent varier en fonction des contextes locaux et des politiques locales.
Ici la bibliothèque abrite de l’aide aux devoirs, là ça se passe dans les maisons de quartier. Ici la bibliothèque dispose d’un espace publique numérique, là un cyberspace distinct jour ce rôle (ce qui n’empêche quand même pas de proposer à la bibliothèque des accès à Internet !). Ici la bibliothèque prête des jeux, là il existe une ludothèque séparée. Et j’en passe.
L’essentialité de la bibliothèque est, ces temps-ci, fréquemment brandie en réaction à la notion de bibliothèque 3e lieu où pour condamner l’introduction du jeu vidéo.
Tels les fixistes niant l’évolution des espèces, on trouve toujours des gens pour prétendre que l’essence de la bibliothèque précède son existence. Heureusement que nous sommes nombreux à… faire bouger les lignes.
Ce qui menacerait la bibliothèque, ce serait sa fixité.
Post scriptum
J’ai repris ce thème dans une intervention à Bruxelles le 20 décembre 2012 : diaporama, texte paru dans Lectures, la revue des bibliothèques de la fédération Walonnie-Bruxelles, n°182, septembre-octobre 2013.
bcalenge said
Bonjour Dominique,
Merci pour cet utile rappel qui ne sera jamais assez répété et encore répété !! Le fixisme que tu relèves tient à mon avis à une insuffisante définition de la bibliothèque publique. J’aime à donner une définition de ce type : « ensemble institutionnel d’agents et de moyens ayant pour mission d’oeuvrer à la meilleure acquisition de connaissances partagées auprès des habitants d’une collectivité donnée, et selon les priorités données par l’autorité collective ». Cette définition large permet d’aborder tous projets de connaissance sans a priori restrictif, et surtout de bien comprendre comment les bibliothèques publiques ont évolué et peuvent proposer des visages différents selon les lieux et les époques…
Amicalement,
Bertrand
Edith Scholl said
On nage en plein sophisme ! Les comparaisons – qui ne constituent pas des raisons comme chacun sait – dénotent l’absence d’arguments solides dans une démonstration. Pour ce qui est de la célèbre formule de Sartre, mieux vaudrait ne pas le prendre comme référence – ce brillant esprit, complètement aveugle en politique – « Tout anti-communiste est un chien » -, s’est trompé tout le temps, sur (presque) tout et n’importre quoi : à propos du nazisme, de Mao à Castro, De Genet à Beni Lévy etc.
Alors si les thèses avancées plus haut sont aussi valides…
Dominique Lahary said
Il m’est arrivé de débusquer des sophisme mais ici vous confondez sophisme et métaphore et condamnez la forme en croyant toucher le fond. Vous n’êtes pas mon professeur, ni de rhétorique ni de logique, et je ne suis pas votre élève. Si mon propos ne vous évoque rien c’est probablement que vous n’êtes pas d’accord, c’est votre droit. Quant aux positions politiques concrètes de Sarte, elles sont ici totalement hors sujet mais puisque vous semblez m’attribuer une opinion sur le sujet à la lecture d’une simple formule philosophique, vous tombez mal : il se trouve que je n’ai pas partagé à l’époque et que je ne partage toujours pas les penchants castristes ou maoïstes d’une homme dont l’oeuvre philosophique n’est pas à passer pour autant par pertes et profits.
Edith Scholl said
C’est vrai je ne suis pas d’accord avec vous mais j’apprécie votre courtoisie (pas toujours présente chez vos commentateurs, c’est le moins que l’on puisse dire).
Il me semble que votre argumentation relève bien du sophisme (raisonnement faux à l’apparence de vérité) même si – et aussi parce que – vous usez de métaphores (« fixisme » contre darwinisme ainsi que le slogan existentialiste « l’existence précède l’essence »).
User de métaphores devrait être réservé au domaine de la poésie et évité (dans l’absolu) dans le champs de l’argumentation. Une métaphore frappe l’imagination et empêche d’utiliser son sens critique. Elle emporte souvent l’adhésion mais par des moyens quelque peu malhonnêtes.
Alors Sartre est peut-être hors sujet mais c’est vous qui l’avez cité (sans le nommer) pour valider votre propos..
Pour terminer en restant encore « hors sujet » : sans adhérer à ses idées politiques, je lui conserve mon admiration et affection ayant été marquée définitivement par « Les chemins de la liberté », « Le mur », « Les mots », « Huis-clos » découverts à l’adolescence …en bibliothèque (un établissement antique conforme à son « essence » originelle).
Dominique Lahary said
Toujours absolument pas d’accord avec votre refus d’un langage imagé que vous assimilez au sophisme. Au reste il ne s’agit pas là de vérité en soi mais de position, de choix, d’engagement, de politique en somme. Nous ne défendons visiblement pas la même. En toute cordialité bien sûr.
La veille apprivoisée #6 « La bibliothèque apprivoisée said
[…] – Non à la ligne claire ! – Dominique Lahary. […]
Yvonnic said
Pour une fois, bravo pour ce rappel darwinien auquel j’adhère à 100%. Ou les bibliothèques s’adaptent ou elles meurent. Métaphore juste, n’en déplaise aux détracteurs. C’est aussi une ode implicite à la révolution permanente et une vraie denonciation des réactionnaires qui brandissent l’essence et l’éternité des missions pour mieux rejeter des pratiques qu’ils réfusent. Le tout est de savoir maintenant pourquoi ils refusent l’introduction du jeu vidéo et autres pratiques.
Autant le lieu bibliothèque peut se revendiquer d’une certaine permanence, autant il est clair que le bibliothécaire d’Alexandrie, comme celui de Musil, sont devenus des sujets de conversation, pas de débat.
Yvonnic
PS; Que disais-je d’autre, finalement, à travers mes différents posts sur l’évolution des bibliothèques ? Certes avec d’autres mots et un autre ton . Mais le péché originel des blogs c’est que la signature et l’image d’un individu valent davantage que ce qu’il dit. Quand on est marqué à la culotte, tatoué comme un intouchable, peu importe le contenu de vos paroles, on ne vous lit plus, on vous perçoit. Ce blog ne fait pas exception à la règle. Dommage.
Dominique Lahary said
Je citerais le Livre des mutations (en chinois Yi King) :
Quand une chose arrive à son terme,elle change.
Si elle change,elle poursuivra son chemin.
Si elle suit son chemin,elle perdurera.
Mais il y a des fixistes. Qui continuent comme ils ont appris. Comme ils se sont formés. Cela ramène à la conception « du » métier. J’y reviendrai.
Yvonnic said
Plutôt que du « métier », notion trop large qui permettra trop facilement à certains de rejeter aux marges certaines notions comme le numérique par exemple, tentons plutôt de parler du « coeur de métier », expression souvent utilisée comme signifiant, justement, le rappel à l’essentiel, à l’essence.
En fait le rappel d’un cadre de référence, où il apparaitra bien vite que si l’on se réfère à la notion de « service public », il devient impossible de rejeter dans l’anecdotique, l’accessoire ou le gadget des missions devenues fondamentales en termes d’attente des publics et des décideurs.
Sous peine de se priver assez rapidement de toute légitimité. Au sens premier du terme, et non pas au sens d’une « légitimité culturelle » idéale, concept étroit qui nous ramènerait bien vite au fixisme « d’éducation » que vous dénoncez très justement.
B. Calenge fait déja un excellent tri au sujet « des métiers », dans un petit billet que je trouve très éclairant :
http://bccn.wordpress.com/2009/05/30/metiers-de-bibliotheque/
Yvonnic -Savonarole said
Il semble y avoir une certaine contradiction entre la volonté de définir le lieu-bibliothèque et celle de définir le métier ou coeur de métier.
La définition du lieu, selon B. Calenge, me semble réductrice. Je le cite : « « ensemble institutionnel d’agents et de moyens ayant pour mission d’oeuvrer à la meilleure acquisition de connaissances partagées auprès des habitants d’une collectivité donnée, et selon les priorités données par l’autorité collective ». Cette définition large permet d’aborder tous projets de connaissance ».
En fait de définition large, je trouve que là encore, on réduit le lieu à une mission primordiale « d’acquisition de connaissances » et de « projets de connaissances ».
N’est-ce pas une forme de fixisme ? Le ludique pur (jeux video etc..) et la convivialité, ainsi que des pratiques larges d’animation sont ainsi rejetées aux marges. Cette définition me semble relever d’une conception utilitariste du lieu, rejetant tout ce qui a priori ne produit pas de la « connaissance ». Nous retournons ainsi à une conception purement culturelle du lieu bibliothèque. Et pourquoi s’acharner à « cadrer » le lieu, puisqu’il est dit qu’il est en contante évolution ?
Et qu’au fond, c’est sa capacité à évoluer en permanence qui tiendrait le mieux lieu de définition. Ainsi, la bibliothèque débordera toujours par définition du cadre qu’on lui aura fixé. Cadre = limites implicites.
D’un autre côté, on pense pouvoir définir le métier. Là encore, me dira-t’on, le métier évoluera en fonction des missions du lieu. Donc, définissons les deux ou ne définissons rien ?
Je propose de tenter de définir ce que le bibliothécaire n’est pas, ne peut ou ne doit pas tenter d’être. Il a eu assez recemment des controverses suite à la nomination d’administratifs à la tête de grosses structures. Une fois les levées de boucliers corporatistes un peu calmées, des réflexions interessantes se sont faites jour, sur le thème : « et si on laissait faire ceux qui savent ? » (Je ne trouve plus les références de ce débat, on m’en excusera). En gros cela consistait à souligner le fait que si, pour des raisons pratiques, le bibliothécaire s’est défini avec le temps comme un « touche à tout », jusqu’à savoir bricoler la photocopieuse, il n’en était pas pour autant devenu un professionnel de tout. Et que, par ailleurs d’autres gens « savent ».
A l’heure où l’on prétend former un cadre de bibliothèque en une semaine, que ne voulons-nous pas ou ne plus être : Nous ne sommes pas des gestionnaires-comptables de bon niveau, nous ne sommes pas foncièrement des « managers », nous ne sommes pas des spécialistes du marketing et de l’image, nous ne sommes pas tous des « animateurs » innés, ni des voltigeurs émmérites de l’informatique tous azimuts ou de l’animation-multimédia. Et pourtant nous le faisons et avons cela en charge de fait. Or tout cela correspond à des métiers, des formations et connaissances qui existent (et là je re-cite B. Calenge qui fait un large tous d’horizon de ces métiers, dans http://bccn.wordpress.com/2009/05/30/metiers-de-bibliotheque/).
Alors que serions-nous, essentiellement ? Des garants du service public, de la pluralité, de l’ouverture, de l’écoute, et de l’adaptation permanente d’un lieu en perpétuelle mutation.
Ce qui nous légitime n’est plus l’importance de notre bagage culturel, notre rôle éducatif, ou notre habileté à nous glisser dans toutes les peaux (nous ne sommes pas des transformistes!).
C’est pour cela que je me permettais de rappeler comme cadre principal de référence la notion de service public, notion bien malmenée actuellement (voir l’évolution des structures anglo-saxonnes) et sans doute futur cadre de combats essentiels dans les années à venir, tant il est vrai que le service public n’est pas un cadre éternel et garanti. Soyons garants de ce qui n’est pas garanti.
, en quelque sorte.
Dominique Lahary said
Je reviendrais sur le métier, sociologiquement incontournable. J’ai un problème avec le coeur. le service public que je lie aux politiques publiques et à l’intérêt général sont un cadre solide, en effet.
Edith Scholl said
… »Un problème avec le coeur » : il faut aller voir de toute urgence le cardiologue ! en toute cordialité bine sûr.
Anonyme said
Mais comment faites-vous pour tenir sans rougir des propos si inconsistants, ressasser de fausses questions, imaginer une réalité qui n’est pas ? Vous radotez Lahary (sans doute l’approche de l’âge de la retraite). Il est vrai que mon hypothèse est invalidée par les éloges de ceux qui vous suivent – et ne sont peut-être pas prêts de passer l’arme à gauche
Aimable
Edith Scholl said
C’est vraiment nul d’attaquer les gens en n’ayant comme argument à faire valoir que celui de leur âge. D’autant plus que d’autres pourraient le faire avec vous aussi (vos collègues trentenaires ou plus jeunes). Quelle déception.
Vous êtes capable pourtant de mieux défendre vos (nos) positions (ou bien c’est « l’âge » qui vous affecte ?)
Anonyme said
« Scholl » : c’est une marque de grolles !
Edith Scholl said
Il n’y a pas qu’un âne qui s’appelle Martin. Cherchez plutôt du côté de « La Rose blanche » si cela vous évoque quelque chose.
Edith Scholl said
Mais j’y pense, « Aimable » : c’est un hommage à un as du « piano à bretelles » ?
Toujours pédant : « grolles » !
Yvonnic said
Pour votre culture et l’édification des masses prolétaires, mon cher Aimable, sachez que B. Scholl est aussi un peintre contemporain spécialisé dans le trompe-l’oeil. Ce qui me parait beaucoup mieux adapté, si comparaison il y a, aux propos retrogrades bien mal dissimulés, de votre interlocutrice, en tous cas mieux que votre minable histoire de godasses….(ils font aussi des semelles anti-transpiration, si le coeur vous en dit)
aimable said
« ils font aussi des semelles anti-transpiration, si le coeur vous en dit » : je me disais en effet que ce nom ne m’était pas inconnu.
Ayant consommé un rhum bien tassé en compagnie d’une créature dénudée – laquelle m’incite à vous traiter comme vous le méritez, Yvonnic (la schlague !) -, je me sentirais presque d’humeur à me placer à votre niveau et à celui de Lahary (ça va pas faire haut tout ça). Mais plutôt que de déchoir (tel un Lahary, stalinien sur le retour abusant des suffixes en « isme ») – et avant d’être définitivement murgé -, je vous recommande la lecture (je suis bibliothécaire) du dernier BBF ou, enfin, le point de vue d’Aimable est à l’honneur – que dis-je, canonisé ! A côté de cette consécration, que valent vos postillons de losers ?
A.
Edith Scholl said
Ah un admirateur d’Arnaud Desplechin : après « Comment je me suis disputé », on passe à « ma vie sexuelle » ! Bel exemple d’exhibitionnisme puéril et naturellement totalement « hors-sujet ».
Attention à l’alcool qui nuit gravement aux performances avec les « créatures » (masculines ou féminines ?). Cette « créature » n’a pas dû beaucoup s’amuser avec un partenaire bourré qui ne pense qu’à aller débiter ses insanités sur un blog – en principe – professionnel.
Et pour couronner le tout, narcissique à en mourir (« je vous recommande la lecture… »)
Yvonnic said
Bel échange littéraire qui fait honneur à la profession, quoique couronné d’une sortie égocentrique assez révélatrice : être reconnu par le BBF ! Aimable aurait donc eu sa médaille des mains de ceux qu’il conspue ? (je ne lis malheureusement pas le BBF). Comme disait je ne sais plus qui, les médailles, c’est comme les hémorroides, tous les trous du cul finissent par en avoir !
Si j’osais, pour finir par une pointe d’humour fin et distingué, je dirais qu’entre la prof de morale anti-sartrienne et le troll dogmatique (et désormais alcoolique) défenseur du prolétariat, le courant passe fort.
Au point qu’on peut dire qu’enfin Aimable a trouvé chaussure à son pied !
Amusant, non ?
Allez, cet effort d’a propos m’a épuisé, une camomille et au lit !
Edith Scholl said
Yvonnic, Vous êtes bien meilleur dans ce registre que dans certains de vos développements poissenotesques et lahariens, tellement abstrus qu’on les relit trois fois sans n’y comprendre goutte.
Là, c’est vraiment très marrant (même si j’en prends aussi pour mon grade) – surtout quand on imagine la colère noire de votre ami Aimable qui doit fulminer en préparant sa réplique la plus meurtrière et pédante (comportant une sentence latine éventuellement) afin de vous clouer le bec définitivement.
Je crains qu’Aimable ait assez peu d’humour (capacité à se moquer – aussi – de soi-même). La dernière fois, il voulait vous administrer « la schlague », attention à vous !
Anonyme said
N’insistez pas, Edith : vous n’êtes pas mon genre.
Aimable.
Edith Scholl said
Mais en effet, vous êtes tout ce que j’aime : exhibitionniste, infatué de lui-même, picoleur, arrêté au stade sadique-anal, misogyne etc.
Cher Aimable, tellement vaniteux que s’en est pathétique !
Anonyme said
D. Lagache, « La jalousie amoureuse ». Paris, PUF, 1997 (rééd.).
Edith Scholl said
Arrêtez, vous me faites rougir !