Mercredi matin 18 juin, alors que la ministre de la Culture allait présenter au Conseil des ministres le projet de loi Olivennes ou Hadopi, rebaptisée Création et Internet, j’entends deux commentaires à la radio :
La main coupée
Sur BFM, Olivier Bomsel, dont je trouve éclairante son analyse du Gratuit marchand, même si on peut lui reprocher de ne voir que lui, répond à la question « Êtes-vous pour la coupure de l’abonnement Internet aux contrevenants ? » ceci: « Ce n’est quand même pas la main coupée aux voleurs, quand même ! » Voilà comment, en niant le fait, il l’a reconnu: la sanction prévue par le projet de loi, c’est l’équivalent de la main coupée au voleur de pomme [Podcast].
Le peer to peer, est-ce une bibliothèque ?
Un peu plus tôt, Bernard Maris sur France Inter, rappelle que des éditeurs voulaient taxer le prêt de livre en bibliothèque et dit que s’attaquer au téléchargement c’est comme s’attaquer aux bibliothèques. les emprunteurs/téléchargeurs sont aussi des acheteurs, dit-il en substance.
01.net avait le 12 juin fait les gorges chaudes dans son billet intitulé Les ex-communistes suédois veulent légaliser le piratage ; « Le partage de fichiers, c’est un peu comme les bibliothèques publiques. Il fallait oser la comparaison. Le Swedish Left Party (ex-parti communiste suédois) n’a pas hésité à faire le rapprochement. »
J’avais lu une remarque de ce genre en pleine bataille de la loi DADVSId ans le commentaire d’un internaute au billet L’avenir des bibliothèques du 1er avril 2006 du député Christian Paul sur son blog Culture numérique :
Le dimanche 2 avril 2006 à 10:30, par Benjamin Thominet
Une communauté P2P n’est-elle pas une sorte de gigantesque bibliothèque?
– c’est ouvert au public
– sans but commercial ou économique direct ou indirect
Vous voyez où je veux en venir ?
Est-ce si saugrenu ? Ça l’est si on considère le fonctionnement : politique d’offre documentaire d’intérêt public d’un côté, mise à disposition anarchique et réciproque entre internautes d’autre part. D’un côté, si l’on veut pousser l’analogie, le communisme étatique (de bas en haut). De l’autre le communisme libertaire, sans État.
Mais l’on se place du point de vue de l’usager, indifférent au système institutionnel, cela revient au même. Cela m’avait permis, lors de la journée Image et son en bibliothèque : Bilan et perspectives à l’heure du virtuel, organisée par la CoBB et l’ACIM à Nantes le 6 avril 2006 de développer pour la première fois le thème suivant : il existe un « système bibliothèque global », dont la bibliothèque institutionnel ne constitue qu’une partie.
Olivier Bomsel, après son aveu sur la main coupée, a d’ailleurs crié au communisme. Du calme. Tout cela se passe dans un contexte d’économie marchande, mâtinée de service public et d’échange-don (comme on dit en anthropologie).